Justice Alimentaire

Lettre ouverte au Maire de Montreuil

À Monsieur Patrice BESSAC
Maire de Montreuil
Place Jean Jaurès
93100 MONTREUIL


Montreuil, 6 mai 2020

Objet : Compensation des dépenses alimentaires supplémentaires pour les familles d’enfants scolarisés à Montreuil

Monsieur le Maire,


Depuis le début du confinement, de plus en plus de personnes dans notre département et à Montreuil souffrent de la faim et de la malnutrition. C’est le cas notamment des familles qui touchent des petits salaires ou des minima sociaux. Elles subissent le surcoût des cantines fermées
qui, pour certaines d’entre elles, étaient moins chères qu’un repas familial. Ces familles se trouvent confrontées à une augmentation conséquente de leurs dépenses alimentaires, alors même que leurs revenus stagnent voire baissent. En effet, la fin de contrat précaire, ou le chômage partiel voire la
perte totale de revenus entraînent de grandes difficultés économiques pour de nombreuses familles.

Dans bien des cas aussi dans notre département et notre ville, l’obligation pèsent pour des pères et mères qui occupent un emploi considéré comme peu qualifié, de continuer à travailler dans des conditions sanitaires insatisfaisantes de transports et de travail. Elles aussi subissent la
désorganisation dans la prise en charge des enfants (particulièrement au moment des repas) et le risque de contamination accrue dans un département déjà sous-doté en moyens sanitaires et hospitaliers.

Il est envisagé par l’État une aide exceptionnelle de solidarité versée en une seule fois à la mi-mai aux familles bénéficiaires du RSA, de l’allocation de solidarité spécifique (ASS) et des APL d’un montant de 150 euros et 100 euros par enfant. De même, le département s’est engagé à soutenir les familles de collégien.ne.s les plus défavorisé.e.s. Vous avez décidé d’aides similaires sous forme de chèques alimentaires pour les 2000 familles bénéficiant d’ordinaire d’un tarif minimal de 0,50 cts € chaque repas scolaire. Hélas, ces aides, même cumulées par les plus précaires, sont insuffisantes à compenser les charges alimentaires assumées par les seules familles au cours des trois mois de confinement/”déconfinement progressif”.

D’autre part, un grand nombre de familles modestes ou de classes moyennes échapperont à ces dispositifs en raison des effets de seuil ou de la composition des ménages. Des décisions à caractère plus universelles devraient être prises pour alléger les familles du poids d’une crise sanitaire qu’elles risquent d’être seules à payer une fois de plus. Tout comme elles devront assumer seules, demain, le coût des protections minimales mises en vente dans le privé, dans les hyper-marchés à des prix prohibitifs, voire même le financement des tests par les particuliers.


C’est dans ce contexte de double crise soulignée par les autorités et, dont plusieurs députés du département se sont fait l’écho, que nous vous sollicitons pour organiser une prise en charge à titre exceptionnel des repas que les enfants scolarisés à Montreuil ne peuvent prendre dans les cantines scolaires. Cette prise en charge ne doit pas concerner que les familles les plus précaires mais être élargie à toutes les familles, déstabilisées par cette situation et sur qui reposent seules tant l’alimentation que le suivi éducatif de leurs enfants. Ne faudrait-il en outre que le budget des cantines, habituellement pris en charge par la municipalité, contribue à financer cette prise en charge selon des modalités les plus équitable possibles ? La forme de chèques alimentaires nous semblant la plus pertinente.


Vous le savez, nous vous avions interpellé dans le cadre de la campagne des Municipales, car nous considérons que l’alimentation fait partie des Communs, au même titre que la santé et l’éducation, et que la réponse à la « précarité alimentaire » ne doit pas être caritative mais politique. Comme vous vous y étiez engagé auprès de vos électeurs, une politique publique nouvelle de l’alimentation doit être mise en œuvre, afin notamment de socialiser le financement des repas des cantines scolaires. L’accès à une alimentation de qualité et durable doit être un droit universel que les pouvoirs publics territoriaux devraient contribuer à garantir.


Cependant, durant la période du confinement, il a été fait appel à des sociétés privées de restauration pour fournir des repas aux soignants et à la grande distribution pour se procurer des denrées alimentaires. Si une cuisine municipale existait, il aurait-il été possible de palier dans les
meilleures conditions aux besoins des familles montreuilloises et particulièrement des plus précaires, des ainé.e.s, des soignant.e.s et des étudiants. C’est pourquoi nous rappelons l’urgence du financement d’infrastructures publiques nécessaires à la « souveraineté alimentaire ».


Disponibles, nous sommes prêt.e.s à échanger avec vous par téléphone ou visio-conférence si besoin est. Le caractère d’urgence absolue nous commande de trouver des solutions rapides pour corriger la situation qui prévaut et fait même redouter au préfet de Seine-Saint-Denis “des émeutes de la faim”. Ensemble agissons vite à hauteur des enjeux !

Dans l’attente impatiente d’une réponse de votre part, nous vous prions d’agréer Monsieur le Maire, l’expression de nos sentiments distingués.

Pour Le collectif Justice Alimentaire
Sylvie GANDON et Marie Thérèse DELEPLACE

Autres collectifs se joignant à notre signature
ATTAC 93sud, AMAP les castors bios, Cantine nouvelle, Terre de lien Montreuil, FCPE UL

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